viernes, 29 de agosto de 2025

'Pour une pratique chrétiienne de la politique' - Engagement personnel

LES CHRÉTIENS DANS LA POLITIQUE PARTISTIQUE

Témoignage personnel

 Pedro Pierre, Guayaquil, février 2025.

Avec les mouvements politiques.

JE SUIS PEDRO PIERRE

C'est comme ça qu'ils m'appellent par ici. Je suis né en France il y a 82 ans de parents petits paysans dans la région montagneuse du centre-sud de la France. J’ai été ordonné prêtre en 1969 dans la capitale départementale.

A l'invitation d'un ami prêtre équatorien, je suis arrivé à Guayaquil en 1976 et j'ai travaillé avec lui à El Guasmo quand le secteur commençait à être envahie, puis à Saint Martín de Porres, dans le bidonville près du pont de Portete.

Nous étions 7 paroisses travaillant dans la ligne de la théologie de la libération sous l’option de monseigneur Leonidas Proaño. Nous nous organisions à travers les Communautés Ecclésiales de Base (CEB), qui ont émergé dans toute l’Amérique Latine et existent sur tous les continents dans les zones pauvres des villes, de la campagne et des peuples indigènes.

Nous croyons que « la politique est la plus haute forme de charité », comme l’a dit le pape Pie XI en 1927 et comme l’a réitéré récemment le pape François. Nous avons découvert que la politique est l’organisation harmonieuse d’une nation, fondée sur le respect, l’organisation et la participation de tous ses citoyens, en particulier les plus pauvres.

Nous optons pour la politique partisane parce que les riches sont incapables d’organiser une société qui englobe tout le monde. C’est pourquoi nous choisissons de soutenir les partis de gauche.

LES RAISONS POUR LESQUELLES JE ME SUIS ENGAGÉ EN POLITIQUE

Si la politique est ce qu’il y a de plus précieux, c’est parce qu’elle est enracinée dans l’identité de tous les êtres humains, qu’elle s’inscrit également dans un grand mouvement cosmique et qu’elle trouve son soutien dans la foi chrétienne.

1.         Je choisis la politique, d’abord parce que je suis humaniste

Les valeurs humaines sont présentes en chaque être humain, notamment la compassion et la solidarité.

-        Nous souffrons quand d’autre souffrent parce que nous sommes tous faits de la même chair, des mêmes os et du même sang. Nous ne sommes pas avant tout des individus indépendants, mais une communauté de vie et de destin. C’est pourquoi nous sommes compatissants les uns envers les autres.

-        Cette compassion nous conduit à aider ceux qui souffrent, surtout lorsque cette souffrance est injuste. En tant qu’êtres humains, nous ne restons pas insensibles ou indifférents au sort des pauvres parce qu’ils sont des victimes innocentes d’un système qui les appauvrit et les tue.

-        En ne restant pas indifférents, nous devenons solidaires de ceux qui souffrent, les aidant à sortir de leur prostration. La pauvreté est un appauvrissement, donc une injustice qui nous appelle à la surmonter avec ceux qui en souffrent. Cet appel à la solidarité vient de l’intérieur de nous, mais il vient d’au-delà de nous.

2.         Je choisis la politique parce qu’elle fait partie de la mystique inscrite dans l'univers

-        La compassion et la solidarité sont au cœur de la mystique du cosmos, car le cosmos n’est pas un univers mort ; c'est la matrice de notre humanité. Dans le cosmos se trouve la graine de la compassion et de la solidarité, car le cosmos est vie, amour et bonheur si nous prenons le temps de l'explorer.

-        Le cosmos, la nature et l’humanité sont une seule unité faite de vie, d’amour et de bonheur. C'est inscrit dans notre ADN. Beaucoup ont perdu ces valeurs, notamment à cause d’ un système social qui nous détruit de l’intérieur. Ce système nous est imposé dès la famille, dans l’éducation scolaire, dans la culture ambiante, dans les religions.

-        Heureux ceux d'entre nous qui ont eu la chance de découvrir et de développer cette mystique, car c'est l'héritage que nous ont donné les personnes que nous avons côtoyées, dans la nature qui nous entoure et le cosmos qui prend soin de nous !

3.         Je choisis la politique parce que Jésus de Nazareth est venu construire un monde fraternel et juste.

a)     L'héritage de mes parents

-        Mes parents étaient honnêtes, rebelles contre l'injustice et chrétiens .

-        Ils n’aimaient pas une foi soumise. Ils parlaient peu, mais ils me disaient : « Le plus important, ce ne sont pas les normes, mais la fraternité. »

-        Mes parents n'aimaient pas l'injustice, c'est pourquoi ils ont toujours aimé l'organisation, aidé les faibles, partagé.

-        Leur foi avait une dimension collective, joyeuse et ouverte à la nouveauté. 

b)     À l’école, j’ai vécu la camaraderie et la découverte de la Bible

-        A l'école primaire et secondaire, nous avions une majorité de maitres d’école humanistes qui nous ouvraient aux problèmes du pays et aux courants de pensée sociale.

-        Comme j'étudiais dans une école catholique, j'ai appris à lire la Bible avec un professeur qui nous disait : « Le peuple de Jésus était un peuple rebelle, et Jésus n'aimait pas l'injustice. »

-        Au grand séminaire, nous formions des groupes de réflexion et nous faisions des visiter les malades, aux personnes âgées, aux gens dans le besoin. Il y avait aussi la solidarité avec les pauvres d’Afrique.

c)      Le service des autre dans mon travail sacerdotal

-        Je vois mon sacerdoce comme l’occasion d’aider les autres à développer tous leurs talents et à s’organiser pour être plus efficaces tant sur le plan personnel que collectif et social.

-        Je me laisse guider par les paroles de Jean-Baptiste à propos de Jésus, qu’il vient de rencontrer et de reconnaître comme le Messie : « Qu’il croisse, et que moi je diminue ! », c’est-à-dire que le peuple des pauvres croisse, et que moi je diminue ! »

-        Je suis également aidé par le critère suivant du pape François : « Le pasteur doit être parfois devant le troupeau, parfois au milieu et d’autres fois derrière. » Le protagoniste principal est le peuple conscient, organisé et actif.

-         L'option de Jésus pour les pauvres développe 3 critères :

1.      Une vie de pauvreté digne, faite de simplicité et d’austérité,

2.      Une insertion parmi les pauvres pour penser, agir et croire à leur manière, faire miennes leurs causes, leurs projets et leurs luttes, et

3.      Une lutte inlassable contre la pauvreté et les structures qui la provoquent.

d)     Ici en Équateur, j'ai découvert une foi libératrice

Les évêques d’Amérique Latine ont tenu plusieurs réunions. Ils y définissent les lignes directrices pour les diocèses et les paroisses.

-        Lors de leur réunion à Medellín en 1968, ils ont déclaré que ‘la pauvreté est un appauvrissement causé par un système et des structures de péché auxquelles il faut faire face avec les pauvres en communautés ».

-        En 1979, à Puebla, au Mexique, les évêques parlèrent d'engagement politique : « Il y a des chrétiens, ainsi que des prêtres et des religieux, qui annoncent un Évangile sans implications économiques, sociales, culturelles ou politiques. Cette mutilation équivaut à une certaine collusion (ou complicité) avec l'ordre établi », c’est-à-dire le ‘désordre’ établi.

Tout cela m’a fait découvrir la dimension politique de la foi chrétienne , et nous avons commencé à participer aux marches du 1er mai, aux marches de solidarité, aux manifestations, etc. et à approfondir cet aspect de la foi et de la politique, à être une voix et une lumière, avec d’autres, dans les campagnes pour les élections locales et nationales.

L'OPTION POUR UN ENGAGEMENT POLITIQUE PARTISAN

1.       En plus de l'Équateur, j'ai passé 8 ans dans une paroisse rurale au Nicaragua

-        C'était à la fin du gouvernement sandiniste , alors que la guerre contre-révolutionnaire financée par le gouvernement des États-Unis se poursuivait.

-        Avec le gouvernement sandiniste, j’ai découvert les bénéfices d’une organisation socialiste de la société, qui s’inspirait de l’expérience cubaine.

-        J'ai fait l'expérience de l'Église des Pauvres, c'est-à-dire une Église aux mains des laïcs organisés en d'innombrables ministères ecclésiaux et activités sociales et politiques.

2.       Une nouveau ecclésiale: Le soutien officiel de l'Église du Nicaragua au socialisme

-        Il faut dire que de nombreux chrétiens et prêtres nicaraguayens ont, d'une part, participé à la guérilla du Front sandiniste pour renverser la dictature de Somoza. D’autre part, ils ont également participé au gouvernement sandiniste.

-        Pour toutes ces raisons, les évêques du Nicaragua ont écrit une lettre encourageant les chrétiens à soutenir le socialisme. Ils écrivaient en novembre 1979, quelques mois après le triomphe de la révolution sandiniste. Ils déclarent ce qui suit :

« Si le socialisme signifie la prééminence des intérêts de la majorité des Nicaraguayens et un modèle d’économie nationale planifiée, solidaire et progressivement participative, nous n’avons aucune objection.

Un projet de société qui garantisse le destin commun des biens et des ressources du pays et qui permet, sur cette base de satisfaction des besoins fondamentaux de tous, l’avancement de la qualité de vie humaine, nous paraît juste.

Si le socialisme implique une réduction croissante des injustices et des inégalités traditionnelles entre les villes et les campagnes, entre la rémunération du travail intellectuel et du travail manuel ; s’il s’agit de la participation du travailleur aux produits de son travail, en surmontant l’aliénation économique, il n’y a rien dans le christianisme qui implique une contradiction avec ce processus.

Si le socialisme implique un pouvoir exercé du point de vue de la grande majorité et de plus en plus partagé par le peuple organisé, conduisant à un véritable transfert de pouvoir aux classes travailleuses, alors une fois de plus il ne trouvera dans la foi que motivation et soutien.

Si le socialisme conduit à des processus culturels qui éveillent la dignité de notre peuple et lui donnent le courage d’assumer ses responsabilités et de revendiquer ses droits, c’est une humanisation qui converge avec la dignité humaine proclamée par notre foi.

En ce qui concerne la lutte entre les classes sociales, nous pensons que la nature dynamique de la lutte des classes, qui doit conduire à une juste transformation des structures, est une chose, et la haine de classe, qui est dirigée contre les individus et contredit radicalement le devoir chrétien d’être gouverné par l’amour, en est une autre. »

3.       L’option partisane d’un groupe d’évêques brésilien

A l’occasion de l’élection présidentielle en 2023, des évêques organisés dans le groupe « Evêques du dialogue pour le Royaume » prenaient une position partisane, sans le nommer, pour Lula da Silva. Voici quelques extraits de leur communiqué.

« Le second tour des élections présidentielles de 2022 nous présente un défi dramatique. Nous devons choisir consciemment et sereinement, car il n'y a pas de place pour la neutralité lorsqu'il s'agit de décider de deux projets pour le Brésil, l'un démocratique et l'autre autoritaire ; l’un engagé dans la défense de la vie, en commençant par les pauvres, l’autre engagé dans « l’économie qui tue »; un qui s'occupe de l'éducation, de la santé, du travail, de l'alimentation, de la culture, un autre qui méprise les politiques publiques, parce qu'il méprise les pauvres. Les deux candidats ont déjà gouverné le Brésil et ont donné des résultats différents pour le peuple et pour la nature, que nous pouvons analyser.

Éclairés par les exigences sociales et politiques de notre foi chrétienne et par la doctrine sociale de l’Église catholique, nous devons parler clairement et directement des véritables enjeux du moment. Jésus nous a commandé d'être « la lumière du monde » et la lumière ne doit pas être cachée (Mt 5, 15).

Nous sommes témoins que le gouvernement actuel, qui brigue sa réélection, a tourné le dos aux populations les plus nécessiteuses, surtout en temps de pandémie. Juste à la veille des élections, il a lancé un programme temporaire pour aider ceux qui en ont besoin… La vie n'est pas une priorité pour ce gouvernement...

Nous avons vécu quatre ans sous le règne du mensonge, du secret et des fausses informations. Les fausses nouvelles (fausses nouvelles diffusées comme si elles étaient vraies) sont devenues la forme « officielle » de communication entre le gouvernement et la population. Cela viole le 8e commandement, celui de ne pas rendre de faux témoignage, mais cela montre également qui est le véritable « seigneur » de ceux qui, de manière perverse, se consacrent à répandre des mensonges et à cacher des informations d’intérêt public. Jésus dit que le Diable est le père du mensonge (Jn 8,44), alors qu'Il est « le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14,6).

Les chrétiens sont capables d’analyser lequel des deux projets en conflit est le plus proche des principes humanistes et de l’écologie intégrale. Il suffit d'analyser avec des données et des chiffres et de se demander : lequel des candidats en compétition a le plus valorisé la santé, l'éducation et la lutte contre la pauvreté et la misère et lequel a retiré les fonds du ‘Système de Santé’, de l'éducation et a mis fin aux programmes sociaux ? Qui a pris soin de la nature, en particulier de l’Amazonie, et qui a encouragé le brûlage des forêts, le trafic illégal de bois et l’exploitation minière sur les terres indigènes ?

Il ne s’agit pas d’une querelle religieuse, ni d’une simple option partisane, ni de l’élection du candidat parfait, mais d’une décision concernant l’avenir de notre pays, de la démocratie et du peuple. »

4.       En union avec les organisations sociales et politiques

L’engagement politique doit se faire avec les partis de gauche, car ils sont les seuls à présenter des propositions et des alternatives viables au système néolibéral fasciste que nous connaissons actuellement.

-        Mes espaces de formation sont, d’une part, les CEB en Équateur et en Amérique latine, et, d’autre part, ma relation avec divers espaces de théologie de la libération.

-        Tout cela explique pourquoi je fais partie de plusieurs organisations sociales et mouvements politiques. Monseigneur Leonidas Proaño déclarait que « les CEB marchent avec les deux pieds : le pied de la Communauté chrétienne et le pied de l’Organisation populaire ».

-        Personnellement, je pense que les organisations sociales et populaires devraient être le berceau des partis politiques afin qu'ils puissent véritablement représenter les intérêts de la majorité du pays.

DANS LA PERSPECTIVE DU 2E TOUR DES ELECTIONS,

… il est nécessaire et indispensable :

-        Promouvoir l’unité de la gauche et renforcer leurs relations avec les mouvements sociaux.

-        Dénoncer le gouvernement fasciste de Noboa.

-        Dénoncez ceux qui ont voté pour Noboa parce qu’ils recherchent un avancement financier personnel.

-        Donner aux pauvres les moyens d’accéder à la conscience, à la dignité et à l’autonomie : c’est cela le « pouvoir du peuple ».

-        Prendre position en faveur la candidate de la Révolution Citoyenne Luisa Gonzalez, qui a participé au gouvernement de Rafael Correa et dont les bienfaits sont connus partout.

J'apprécie votre amitié, je vous félicite pour votre engagement.

et je suis heureux de pouvoir apprendre de vous.

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