L’ E S P É R A N C E V I V A N T E E T S Û R E.
« L'espoir est ce qui meurt en dernier » dit le
proverbe : cela nous encourage en ces temps de chaos global à discerner des
chemins d'espérance et à les entreprendre collectivement. Ce chaos mondial est
semé principalement par le système néolibéral actuel. C'est pour cette raison
que le pape François est si dur contre ce système, bien plus que les papes
précédents. Ce système bénéficie également de notre complicité souvent
inconsciente. Cependant, derrière les nuages de la cruelle réalité dont nous
souffrons, l’étoile de l’espérance nous fait un clin d'œil.
Nous avons besoin d'une vision claire qui nous
fasse sentir cette espérance sûre : elle est en nous, auprès de nous. C’est la
présence du Royaume à reconnaître et renforcer. L’espérance nous attend à
chaque pas, chaque étape, chaque lutte. L’essentiel du système néolibéral est
de donner une valeur marchande à tout ce qui existe, de telle façon que celui
qui n'a rien ou ne produit rien, ne vaut rien. Heureusement la résistance vient
de partout et plus particulièrement des pays du Sud. Nous sommes tous impliqués
dans cette double dynamique : soit nous laisser emporter par l'accumulation de
biens qui nous fait perdre le sens de notre dignité et de la valeur de la
fraternité soit puiser dans le trésor des cultures et des religions pour
revenir à la vérité de la vie : seul l'amour va nous sauver, l'amour avec les
autres et l'amour de la nature. Alors nous comprenons la raison des guerres en
cours : contrôler l'accumulation de biens et privilèges favorisant la mort, la
destruction et le génocide. La technologie des ordinateurs, des téléphones «
intelligents », nous contrôlent de plus en plus. La course à la recherche du
profit illimité produit les inégalités les plus horribles au sein des pays et
entre les continents. Les conséquences sont la faim, la migration et «
l'invasion » actuelle de l'Europe... Les médias sont la nouvelle religion,
leurs messages sont les nouveaux crédos : ils nous font croire que les biens
matériels vont nous donner le bonheur et le salut éternel.
Heureusement contre ces catastrophes scandaleuses
et mortelles se présentent beaucoup d’alternatives prometteuses à portée de
main si nous savons les reconnaître, les adapter et les socialiser. Au sein des
pays du Nord des voix, des groupes, des mouvements, des réalisations nous
avertissent des pièges tendus. Ils dénoncent les mensonges de ce système
pervers. Ils ouvrent de nouvelles voies qui nous donnent le vrai sens de la
vérité, du bonheur, du salut. Les pays du Sud trouvent dans leurs cultures,
leurs visions du monde et leurs pratiques anciennes la force de dire non à ces
illusions et nous proposent des solutions au suicide collectif de plus en plus
réel. Ces propositions de nouvelles conditions de vie nous viennent des
populations autochtones des Amériques du Nord, du Centre et du Sud. En Afrique,
malgré le pillage systématique, apparaissent des propositions de coexistence
pacifique et d'avenir plus heureux. Les cultures asiatiques nous révèlent les
chemins d’une vie plus harmonieuse.
Le christianisme retrouve ses racines et cherche
chez le prophète de Nazareth l'essence de son message et sa mission. Son projet
du Royaume, plus qu’une religion, est un mouvement qui met la fraternité dans
le centre de la vie individuelle et sociale, dont les pauvres sont les
gardiens... Tout cela vient de Dieu. Des milliers de communautés dans tous les
continents ont déjà pris cette voie à partir de leur culture et de l'histoire.
Les résistances ne manquent pas au sein des Églises et des pouvoirs financiers
et guerriers qui veulent tout contrôler pour leur propre bénéfice.
Nous sommes tous impliqués dans ces changements
tumultueux : les nuages et les ouragans ne manquent pas ; mais ils ne
détruisent pas le soleil qui nous illumine et nous réchauffe. La tentation de
se décourager est présente. Nos groupes, les communautés, les associations sont
la garantie que nous ne nous trompons pas dans nos décisions, nos luttes à
entreprendre et les certitudes qui apparaissent le long du chemin. Nous qui
vivons en Amérique Latine, nous nous rendons compte de la force de cette
espérance qui grandit peu à peu. Pendant 500 ans, les peuples indiens n’ont
cessé de résister à la fois contre la domination des empires du Nord et contre
la complicité des Églises avec eux. Nombre d’hommes et de femmes ont misé sur
le respect des cultures, la fraternité des peuples, les richesses des sagesses
et la valeur des religions indigènes et noires au cours de ces cinq siècles.
Les 50 dernières années marquent une renaissance de l'espoir : « Un autre monde
est possible, nécessaire et urgent » ; il se construit en nous et entre nous.
Ils sont nombreux ceux qui ont donné leur vie pour cet autre monde possible,
qu’ils soient Indiens, chrétiens ou athées. Ils sont les guides qui marquent la
direction.
Confirmons la route ouverte par le passé et le
présent, l'éthique et la foi, l'espérance et la lutte, la spiritualité et le
partage. La tâche commence par chacun de nous. Soyons de plus en plus humain ;
grandissons dans la dignité, la coexistence fraternelle, le respect de la
nature. Centrons-nous sur le grand mystère de la vie et de l'amour que nous
appelons Dieu. L'ordre qui nous rend heureux est celui qui met les choses, les
biens, l'économie au service des gens. La politique n'est rien de plus que le
souci des autres et l'union de solidarité sans frontière. La foi, ce n’est pas
croire en Jésus, mais avoir la foi de Jésus : la foi en un Dieu miséricordieux,
une foi liée à la justice pour tout le monde. Tout cela n’est pas loin de nous,
ni impossible à faire : tout est en nous et à notre portée. Nous avons commencé
à l'accomplir dans des petites actions et activités. Il s’agit de poursuivre le
chemin, l‘agrandir, l’améliorer, le célébrer. Il ne s’agit pas de courir, mais
de faire de petits pas sans s’arrêter et de nous rendre compte ce ces multiples
efforts faits sans bruit par beaucoup de gens : c’est le monde nouveau qui
jaillit de nos efforts communs. La puissance de Dieu nous accompagne comme à
l'époque de Jésus, comme au cours des siècles et pour les années à venir.
Pedro Pierre,
avec Equipes Enseignantes.
Paris, septembre 2016.
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